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Anders Johansson - Jens Johansson - Allan Holdsworth : Heavy Machinery (1996 - cd - parue dans le Koid9 n°29)

(584 mots dans ce texte )  -   lu : 804 Fois     Page Spéciale pour impression

Vous n'aurez probablement jamais entendu parler de ces deux CD qui n'ont pas été distribués chez nous. Il convenait de réparer cette injustice même s'il vous faudra peut-être de la patience pour dénicher ces albums pilotés par le tandem des frères Johansson, par ailleurs responsables de leur propre label Heptagon. Jens, le claviériste, est connu des amateurs de métal progressif à tendance classisante puisqu'il a officié aux côtés d'Yngwie Malmsteem (avec son frère Anders) et que Stratovarius et Mastermind le comptent actuellement parmi leurs membres. "Heavy machinery" bénéficie de plus de la présence d'un invité exceptionnel, Allan Holds-worth qui, faute de reconnaissance, semble avoir tourné le dos au monde de la musique ces dernières années. Le trio nous offre donc un jazz fusion de grande classe mais dont chaque morceau, à la différence de ceux d'un Jac La Greca très attaché à la construction, à la mélodie et à l'harmonie, repose en fait sur un nombre limité d'idées, en général un groove, une ligne de basse ou quelques accords qui sont prétextes à laisser s'exprimer les talents de solistes de Jens et d'Allan. S'il y a démonstration technique, elle n'est nullement froide et ennuyeuse car ces deux musiciens ont aussi prouvé qu'ils étaient de bons compositeurs. Le tout constitue un album plus rythmique que réellement mélodique. Anders est un batteur exceptionnel qui raffole des rythmes alambiqués ("good morning, mr coffee"). Jens utilise souvent l'orgue de même qu'un son analogique "trafiqué" qui s'approche de la guitare électrique (un peu à la manière de Toshio Egawa sur les derniers albums de Gerard). Il se charge aussi de la basse-synthé, très séquencée et percussive. La musique atteint parfois une grande intensité comme sur "beef cherokee" où, sur la rythmique enfiévrée d'un Anders proprement déchaîné et quelques discrets accords de claviers, Allan lâche la bride pour terminer sur l'un de ses plus beaux exploits de guitare ! Ca serait dommage de rater ça, non ? Attention au court morceau fantôme qui surgit plusieurs minutes après la fin officielle du CD !

Un an plus tard, voici un nouveau CD qui, même s'il apparaît comme un album solo de Jens, réunit à nouveau les frères Johansson. Apparemment friands du style "legato" (notes coulées) développé par Holdsworth, c'est encore à deux pointures de la guitare qu'ils se sont adressés: Shawn Lane (un émule du Maître) et Mike Stern (un habitué des sessions). On retrouve toujours un style fusion caractéristique mais la musique se rapproche beaucoup plus du progressif. "don't mention the war", une suite de 11 minutes à la rythmique entêtante, est le sommet de l'album et rappelle UK, voire Gentle Giant durant un interlude tout en contrepoint. Les atmosphères alternent de manière plus équilibrée et l'on passe de la tension de "phase camouflage" et de son séquenceur qui s'emballe à l'accalmie de "zero sum game", interprété au piano solo sur des nappes de synthé evanescentes. "Fission" est de plus un festival de rythmiques impaires et de mesures composées, avec une certaine obsession pour le chiffre 7 (le label ne s'appelle-t-il pas Heptagon ?) qui est un peu le symbole rythmique du rock progressif (et ses célèbres mesures en 7/8). Bref un "casse-tête" musical plus que réjouissant !

Jean-Luc Putaux

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