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Sigur Ros : ( ) (2002 - cd - parue dans le Koid9 n°44)

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Les 4 musiciens islandais du groupe Sigur Ros avaient rencontré un franc succès d'estime il y a deux ans lors de la parution de leur magnifique album intitulé "Agaetis byrjun" (cf. Koid’9 N° 37). Ces derniers viennent de remettre le couvert avec "( )", un nouvel opus au titre (et au packaging) on ne peut plus énigmatique et dépouillé, tout à fait à l’image de leur univers musical si caractéristique. Et croyez-moi, cet album va faire date pour bon nombre de mélomanes ! Toujours située entre "post-rock" sous éther et chant liturgique décalé, la musique de ce quatuor formé en 1994 se révèle encore plus belle, intense et enivrante que par le passé. Il s’agit là en effet du 4ème album du groupe, leurs deux premiers essais n’ayant malheureusement pas trouvé distributeurs hors frontières à ce jour. Après "Von" (1997) et "Recycle bin" (disque de "remixes" paru dans la foulée l’année suivante), c’est bien "Agaetis byrjun" qui a offert à Sigur Ros la véritable reconnaissance publique et médiatique à l’échelle internationale, sans compter que ces derniers ont assuré (et ça aide !) la première partie des concerts européens de Radiohead durant la tournée "Kid-A". A l’origine, Sigur Ros est une formation en trio fondée à Reykjavik à l’initiative du talentueux chanteur et guitariste Jonsi Birgisson, puis complétée par Georg Holm à la basse et par un certain Agust à la batterie. Ce dernier se tournera très vite vers une prometteuse carrière de graphiste, abandonnant le groupe au profit d’Orri Pall Dyrason, toujours "en poste" aujourd’hui. Puis, peu de temps après sa "genèse", le jeune combo se verra renforcé par l’intégration de Kjartan Sveinsson, crédité aux guitares et claviers. Sigur Ros peut se traduire par "Victoire Rose", en hommage au prénom de la petite sœur de Jonsi, dont la naissance correspond précisément à celle du groupe islandais. Si la comparaison avec l’œuvre de formations "modes" et contemporaines telles que Mogwai, Spiritualized, Radiohead ou Godspeed You Black Emperor (autre merveille du moment) peut paraître évidente, la seule véritable "influence" reconnue de nos musiciens prend source dans la majesté des grandes étendues sauvages de leur pays d’origine. Tous les mystères et légendes de l’Islande, terre des extrêmes et des contrastes, semblent en effet se concentrer dans ce majestueux "space-rock" d’avant garde dont seul le groupe a le secret. Avec "( )", Sigur Ros transcende tout ce qu’il a pu produire auparavant, atteignant véritablement ici des sommets sur le plan créatif et émotionnel. Ce nouvel opus est en effet un pur joyau de profondeur et de mélancolie, totalement habité par la voix lancinante et androgyne de Jonsi Birgisson, se fondant à merveille aux nappes de claviers planantes et éthérées de ses acolytes (sans oublier les magnifiques séquences de piano et de cordes classiques qui ponctuent l’album). A noter que le fameux Jonsi utilise un archet de violoncelliste pour jouer de sa guitare, ceci ayant pour remarquable effet de produire un son glacial et hypnotique, à la foi si proche et si radicalement différent d’un glissando façon Daevid Allen (Gong). Par ailleurs, notre leader bouleverse également quelque peu la tradition orale de son pays natal en s’exprimant dans un chant inventé et improvisé qu'il qualifie lui même "d’hopelandais", ceci ajoutant encore davantage de mystère et d’insolite à la musique de Sigur Ros. Confondantes de beauté étourdissante et de douce sérénité, les huit compositions de cet album indispensable s’écoutent comme un tout, comme un grand et long trip onirique qui vous emmène au plus profond de la magie des terres nordiques, et bien au delà… Mais ne vous méprenez pas : à l’image des fameux contrastes islandais que j’évoquais un peu plus haut, les envoûtantes mélopées de Sigur Ros peuvent s’envoler crescendo de leur propre source minimaliste et quasi-religieuse pour aboutir à un véritable tourbillon rock explosif, d’une incroyable puissance émotionnelle. Le dernier titre de l’album (mais quel titre d’ailleurs ? Le livret du CD est aussi vide que les vastes étendues lunaires islandaises !) vous en fera la plus sublime des démonstrations. Un disque résolument progressif malgré son réel dépouillement, à déconseiller donc aux inconditionnels bornés d’une certaine (pseudo) virtuosité tapageuse. Pour ma part, je tiens bien là l’album de l’année 2002.

Philippe Vallin




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