Lazona : Le Notti Difficili (2003 - cd - parue dans le Koid9 n°46)

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Pas de Panique, Lazona n’est pas une "maladie infectieuse due à un virus du groupe herpès, caractérisée par une éruption de vésicules ayant une disposition strictement unilatérale et accompagnée de douleurs intenses de type brûlure". Non, il s’agit juste (et heureusement pour nous !) d’un nouveau projet musical emmené par le prolifique et éclectique compositeur/bassiste italien Fabio Zuffanti, qu’il est inutile de présenter aujourd’hui à tout amateur de progressif qui se respecte. Et puisque je cite le terme "progressif", sachez donc qu’après en avoir exploré les aspects les plus expérimentaux (Finisterre) et symphoniques (Hostsonaten, Merlin, La Maschera Di Cera), c’est aujourd’hui vers ses penchants les plus "planants" et contemporains que vient s’intéresser notre talentueux musicien. Pour mener à bien cette initiative, celui-ci s’est entouré de ses trois complices et compagnons de route que sont Stefano Marelli (guitares), Agostino Macor (claviers) et Marco Cavani (batterie/percussions), accompagnés de l’excellente Michele Nastasi à la trompette. La musique développée par ce nouveau collectif formé en 2002 n’a donc que très peu à voir en effet avec le symphonisme délicat cher au rock progressif italien, se rapprochant bien davantage des projets "ambient" de Steve Wilson (Bass Communion, IEM, No-Man), du "rock de chambre" à la fois intimiste et grandiose des Godspeed et autres Mogwai, ou encore de certaines productions du label ECM, situées entre jazz éthéré et musique électronique aventureuse. Par exemple, il est difficile de ne pas penser à l’univers onirique du norvégien Nils Petter Molvaer (les rythmes empruntés à la culture techno en moins), tant ce choix d’intégrer la trompette (à la fois discrète et sublime) dans le projet Lazona se révèle pertinent et efficace. L’emploi de cet instrument nous évoquera aussi la mélancolie des meilleurs moments du célèbre "Apocalypse des animaux", œuvre de référence signée de main de maître par Vangelis au tout début des années 70, et dont la musique (à défaut du son) n’a pas pris une ride trente ans plus tard ! Mais revenons-en à l’œuvre qui nous intéresse de prime abord : "Le notti difficili" est conçue comme une unique pièce de 45 minutes, divisée en quatre phases s’enchaînant les unes aux autres, alternant passages climatiques de toute beauté et envolées de guitares en puissance (un peu à la manière des crescendos d’un Godspeed You Black Emperor !), sur fond de textures de claviers et nappes de mellotron omniprésentes. La maîtrise de l’ensemble est quasi parfaite, mis à part les séquences rythmiques quelques peu approximatives de Marco Cavani, malheureusement incapable d’assurer un break convenablement. Et c’est bien le seul point noir (très relatif d’ailleurs) de cet album enivrant qui ravira à coup sûr les amateurs de musiques à la fois complexes et dépouillées, atmosphériques et improvisées, issue d’une tradition propre aux 70’s (le spectre du meilleur Floyd plane ici encore !), tout en se voulant profondément ancrée dans l’air du temps, voir tournée vers l’avenir… L’album reste cependant réservé à un public averti, pour qui le terme "ambient" ne rime pas forcément avec "vide" ou "ennui". Car il est en effet très peu question de "rock’n roll" dans ce magnifique "Le notti difficili", qui risque d’en prendre plus d‘un au dépourvu (ce qui n’est d’ailleurs pas forcément un mal non ?) ! Quoi qu’il en soit, Fabio Zuffanti semble ne jamais vouloir se répéter, et je ne peux que saluer pour ma part le talent (et le culot !) dont le musicien fait preuve ici une nouvelle fois. L’une des grandes surprises du moment, et un incontournable de plus à se mettre sous l’oreille !

Vlad Vallinescu

(avec tous mes remerciements au "Petit Larousse" pour l’aide médicale apportée)






Cet article provient de Koid'9 magazine rock & progressif

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