Reuter-Boddy : Pure (2004 - cd - parue dans le Koid9 n°52)

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Cet album est à mi-chemin entre la musique nouvelle et l'ambient. Une association entre un jeune guitariste allemand, Markus Reuter, et un vétéran anglais de la scène électronique, Ian Boddy. "Pure" est basé sur une série de pièces improvisées par Reuter, le tout ayant été arrangé ensuite par Boddy à l'aide de ses synthés. L'album se décompose en 11 morceaux allant de 3:48 à 8:42… Ne vous laissez pas rebuter par le terme "improvisation"… On ne le dirait pas et les mélodies de base ont peut-être bien été répétées à l'avance… Car ici, la plupart des morceaux sont mélodiques, ou simplement basés sur des harmonies, des cascades cristallines de la guitare, mais on est frappé par la beauté de la plupart des compositions, par celle des textures synthétiques utilisées.

Parfois les échos réverbérés par Reuter semblent infinis et les synthés de Boddy sont presque minimalistes, parfois on cherche les sons de guitare et on a l'impression d'être uniquement en présence de claviers ! Il faut dire que Markus Reuter utilise une "touch guitar" (comme la Warr guitar), un instrument qui peut en effet produire à volonté des textures de claviers. Le concept n'est pas si nouveau... Manuel Göttsching produisait dès 1975, sous le nom d'Ash Ra Tempel des albums proches de ce que pouvait faire Tangerine Dream à la même époque, c'est-à-dire une musique basée essentiellement sur les synthétiseurs. Et puis bien sûr, Robert Fripp a fait de même dans ses albums en solo. Ici, suivant les morceaux, on est justement à un point de rencontre entre le passé et le présent, du point de vue des sons et de la musique. On reconnaîtra parfois des échos du Tangerine Dream des années 73-78 dans des textures planantes magnifiques ("immersion"), on entend même du mellotron. Parfois on pensera à la musique electro actuelle, à la musique minimaliste contemporaine, à des groupes tels que le Duritti Column de Vini Reilly… Certains morceaux sont totalement dénués de percussions, sans rythme, d'autres au contraire contiennent des séquences, des bruitages divers, la "touch guitar" elle-même remplit parfois ce rôle. Rajoutez à cela quelques vocaux traités ici et là, mais assez rarement. Malgré ce que nous dit le communiqué de presse à ce sujet, cela pourra paraître un peu froid dans certains cas, dans d'autres c'est tout simplement émouvant de beauté abstraite.

La recherche sonore est remarquable et on se dit, en écoutant un album tel que celui-ci, qu'on aimerait bien que davantage de groupes de rock progressif actuels se souviennent du moteur qui animait pas mal de leurs aînés : la recherche sonore, l'expérimentation. Et "expérimentation" ne veut pas forcément dire "dissonance". La preuve en est faite une fois encore, avec ce "Pure" qui possède un charme intemporel et qu'on peut considérer à juste titre comme réellement progressif, même s'il n'est en aucun cas basé sur la virtuosité instrumentale.

Marc Moingeon

Label du groupe






Cet article provient de Koid'9 magazine rock & progressif

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