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Après les expérimentations parfois hermétiques du précédent opus, Isildurs Bane nous revient avec un album presque aussi déroutant, mais pour des raisons résolument inverses. Car "Mind vol.4", à la différence de tous les albums du groupe, est un album marqué par l'omniprésence du chant, en anglais.
Isidurs Bane n'avait plus fait appel au chant depuis les sorties de "Sagan on dem irlandska algen" et "Sagan om ringen", leurs deux premiers albums. Mais il faut tout de même reconnaître que la chanson vue par Isildurs Bane, ça ne sonne pas vraiment comme de la chanson "classique".
L'idée de faire un album avec du chant et des paroles remonte à 1999, lorsque le groupe travaillait avec Bernt Daniel sur le projet "Screenplay", qui mélangeait musique, tableaux, gravures et sculptures. Après trois ans de travail, ce projet a hélas été abandonné, mais Isildurs Bane s'est replongé dans ses compositions pour leur donner une nouvelle vie. La plupart d'entre elles étaient conçues pour accueillir paroles et chant, et le groupe a décidé de continuer dans cette voie, après 20 ans de musique presque exclusivement instrumentale (à quelques phrases parlées, et quelques vocalises près).
Très franchement, à l'écoute du premier titre "halo", qui évoque le premier Goldfrapp, on se demande s'il n'y a pas eu erreur en usine. Mais dès les premiers instant de "heal", l'avalanche percussive nous rassure, ce disque est bien l'œuvre du plus talentueux groupe suédois. Et pour peu qu'on soit encore sceptique, vu que la musique est clairement au service de la mélodie vocale, les arrangements de vibraphone, violon et parfois aussi de piano, lorgnant plus qu'à leur tour sur la dissonance achèvent définitivement de nous convaincre.
En fait, on a vraiment l'impression que Isildurs Bane, après longtemps avoir vécu en autarcie, et après une dernière expérimentation très extrême ("Mind vol.3"), s'est subitement mis à écouter la musique d'autres artistes contemporains, voire même peut-être, la radio (si elle s'avère plus riche en Suède qu'elle ne l'est en France). Ce faisant, le groupe a découvert une pop dont, à l'évidence, il a trouvé des éléments séduisants. Ensuite, il a travaillé, selon la démarche qui a toujours été la sienne, bien avant la naissance du concept Mind, en construisant des ponts entre ces musiques et celle qui lui est propre. Et le résultat est sans conteste fascinant.
D'autant que l'apport des trois vocalistes principaux est d'une richesse exemplaire, et complémentaire. A commencer par Christof Jeppsson, dont la voix cassée et expressive évoque tour à tour Seal et Peter Gabriel, il fait notamment des merveilles sur "cage", dont les passages agressifs évoquent le King Crimson de "The power to believe". Anna Lönnberg et Mariette Hansson, quant à elles présentent deux facettes vocales très différentes, l'une avec un filet de voix suraigu et cristallin, l'autre avec une voix suave de jazz woman.
Autour d'eux, une musique aux arrangements à base de vibraphone, violon, trompettes, flûte, guitare et trombone, que l'on pourrait considérer comme typiques de la musique de Isildurs Bane ("idea" semble tout droit sortir de "Mind vol.1"), mais qui, utilisés dans le contexte presque pop de ce disque créent un effet tout simplement unique de beauté et d'étrangeté. Et comme pour secouer ces moments de beauté contemplative, le groupe n'hésite pas, comme sur "cage" ou "rage", à enflammer son propos en alourdissant sa rythmique et en mettant aux avant-postes la guitare de Jonasz Christofs pour des passages enfiévrés dignes du King Crimson de "The power to believe". C'est tout simplement saisissant !
Au final, un disque qui certes ne ressemble à rien de ce que l'on aurait pu attendre de Isildurs Bane, mais qui n'en est pas moins remarquable, tant dans ses qualités que par sa fidélité à l'esprit progressif du groupe, et à celui de Mind.
Daniel Beziz
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