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Poursuivant son aimable schizophrénie, le "maître" continue donc d’alterner albums "rocks" et albums "classiques". Au formidable "Wild orchids" (cent fois) hélas non suivi d’une tournée, succède "Tribute". Avant de vous dire tout le bien qu’on en pense, il faut quand même savoir que Steve - ce n’est pas anecdotique - vient de divorcer de Kim Poor, l’artiste peintre qui lui illustrait merveilleusement tous ses disques et à qui il dédicaçait à tous coups chacun de ses disques. C’est elle qui l’avait amené à prendre confiance en lui jusqu’à quitter Genesis après "Wind and wuthering" pour voler des ses propres ailes. On sait qu’il a bien fait. 33 ans de mariage. Joli score ! La muse envolée - la couverture de ce disque est une simple photo - Steve s’offre un hommage à l’un des musiciens qu’il vénère depuis la nuit des temps, l’espagnol Andrés Segovia qui à lui seul, a inventé la guitare classique tout en prenant ses distances avec le flamenco.
Avertissement : il n’y a pas plus classique que ce "Tribute" (à Segovia, donc). Rien d’autre que sa guitare enregistrée au plus près et au plus profond par le fidèle Roger King. Dans le genre (qui peut défriser- il n’y a pas si longtemps la guitare classique me faisait braire car c’était toujours très sérieux !), il s’agit du meilleur album de Steve. Jamais il n’a été aussi nuancé, son doigté passant du scandé au velouté dans le même morceau avec une aisance confondante (et une prise de son al dente). Six morceaux sur treize sont des transcriptions pour guitare de Jean-Sébastien Bach. (dont le célébrissime "Jesus joy") que Segovia avait lui même présenté. On ne va pas vous faire "un morceau par morceau" d‘autant qu’on quitte ici les rivages de la Prog pour le classissisme pur et dur. Mais il y a deux chef-d’œuvre au milieu du bouquet : "chaconne", de Bach où par quatre fois on croit que c’est fini et à chaque fois ca repart en plus difficile. La prouesse technique que réclame ce redoutable morceau de 12’34 est parfois invraisemblable et on se demande dans quel état doivent être les doigts du "maître" après cela ! Et puis, un morceau de Steve lui même "the fountain suite" l’un des plus beaux qu’il ait jamais écrit. On a aussi le béguin pour l’hispanisant "catedral".
Steve Hackett n’a jamais été aussi virtuose (on a souvent l’impression qu’ils sont deux à la guitare), sensible, émouvant. Ce surdoué du manche me laisse de plus en plus baba. Sa palette est hallucinante. Diapason d’or !
Jean-Marie Lanoë
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