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Ce n'est plus un secret, il a longtemps que la musique de Gandalf n'a plus la complexité et la dimension symphonique du genre progressif dans le sens plus ou moins strict du terme. Bien souvent, on lui a collé l'étiquette "new age"… D'ailleurs, le label Real Music est vraiment spécialisé dans la musique de relaxation… Mais suivez mon conseil : oubliez les étiquettes et les idées préconçues. Oui, "Sacred river" est complètement paisible, sans véritable envolée grandiose, inspiré par les cours d'eau dont on entend des bruitages à plusieurs reprises tout au long du disque. Les arrangements sont presque totalement acoustiques en ce qui concerne les guitares, lesquelles sont en général au cœur de la mélodie principale. Côté claviers, on retrouve ces mêmes sonorités de hautbois et ces nappes orchestrales assez organiques que l'Autrichien a l'habitude d'employer très souvent, et pas mal de piano. C'est d'ailleurs ce qui fait sa personnalité, et aussi la profondeur de sa musique, loin des clichés artificiels qu'il a lui-même effleuré en de rares occasions (le côté world music, avec vocalises et rythme orientaux plus ou moins programmés !). C'est aussi un véritable album solo au sens propre du terme, car il n'y figure aucun invité, comme d'ailleurs sur "colours of a new dawn" (exception faite des quelques vocalises féminines sur ce dernier). Il se compose de dix morceaux durant de 3 à un peu plus de 7 minutes pour un total d'un peu moins d'une heure.
D'accord, on peut mentionner le défaut désormais habituel : une certaine similitude entre ces mélodies et celles que produit le musicien depuis des années. De plus, "blossoms falling like snow", le titre le plus long, contient un thème évoquant fortement le célébrissime "jeux interdits" ! Ce n'est heureusement qu'un thème parmi d'autres sur une pièce par ailleurs intimiste et magnifique, un peu plus complexe et même légèrement tendue par moments. Mais parfois, cette similitude s'appelle juste "personnalité" !
Cependant, si on veut bien se concentrer sur cet album en oubliant les autres, si on aime le style Gandalf, on peut difficilement rejeter ce disque qui, comparé à certains autres, possède une nuance intimiste et une émotion particulière. Pas de world music artificielle, pas de rythme programmé, pas de cliché inhérents au "new age" commercial, justement. Comparé au précédent disque, les mélodies sont même plus inspirées. >
D'accord, nous vivons une ère de plus en plus troublée et nous sommes soumis à toutes sortes de stress, et on se sent parfois presque forcé d'écouter des musiques qui en soient plus ou moins le reflet. Pourquoi donc ? Les adjectifs "mou", "niais", "lénifiant" que l'on pourrait attribuer à cette musique sont tout à fait subjectifs. Gandalf n'obéit à aucun impératif d'ordre commercial et, contrairement à d'autres musiciens qui se sont parfois fourvoyés dans la niche "new age", lui arrive à laisser transparaître beaucoup de sensibilité dans cet album. Le multi-instrumentiste garde une nuance très organique. Grâce à son talent de guitariste (son jeu est plein de finesse et sait se faire plus complexe lorsqu'il le souhaite) et son amour du piano et de timbres souvent proches d'instruments acoustiques, en plus de ceux plus typiquement artificiels qu'il sort de ses synthés, ce nouvel album fait preuve d'une profondeur bien réelle. Et même si l'on est en droit de regretter les grandes envolées orchestrales et les soli de guitare électrique du bien nommé "Symphonic landscapes" ou les structures plus complexes de "Magic theater" ou "Invisible power", ou encore le dynamisme et la coloration celtique de "Visions 2001", "Sacred river" reste un album sincère et beau, que je ne saurais trop vous recommander d'écouter attentivement les yeux fermés pour laisser votre imagination vagabonder au sein des paysages bucoliques que cette musique simple et belle ne peut manquer de susciter.
Marc Moingeon
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