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Le premier album de Cryptic Vision (soigneusement passé en revue par Cousin Hub dans ces pages) avait été une belle surprise en 2003, nettement inspiré par Kansas et le rock AOR américain, pas révolutionnaire mais fortement mélodique et bien interprété. Par contre, l'album live enregistré au festival ROSFest, dont vous avez pu lire la chronique dans le n°58, était plus décevant.
Pourtant, ce nouveau disque studio est un très bel effort, où le groupe a de toute évidence voulu privilégier la voie du rock progressif. Nous avons là 73 minutes de musique répartie sur 12 morceaux, avec au départ une suite de 16 minutes ("as a world") et encore deux morceaux de 8 et 10 minutes, les autres tournant plutôt autour de 4-5 minutes. Seulement, comme tout s'enchaîne et que l'album se termine avec un reprise de deux thèmes déjà abordés, on a une impression de continuité évidente.
Cryptic Vision, c'est ouvertement le bébé de Rick Duncan, batteur, claviériste et guitariste, compositeur quasi-exclusif de la musique et des textes, ingénieur du son. Autour de lui, le bassiste Sam Connable, le chanteur Todd Plant, le guitariste Timothy Keese et le claviériste Howard Helm, plus pas mal d'invités sur cet album, dont l'excellent violoniste David Ragsdale et, parmi les quatre guitaristes invités (oui, pas moins de quatre, ça fait beaucoup ! Que fait Timothy Keese ?), on trouve Alan Morse de Spock's Beard.
Cette fois-ci, les références au côté symphonique de Kansas et de Yes sont plus nettes, avec de beaux développements instrumentaux, également pas mal de plages plus ou moins acoustiques. Une autre influence relativement évidente est celle de Spock's Beard et Neal Morse… On pourra faire quelques parallèles avec "Testimony" (très net sur la suite "power to mend") ou encore "One". Ceci dit, Morse and Co ayant eux-mêmes tendance à puiser de manière non dissimulée dans le répertoire prog, rock et pop des années 70 ou plus récentes, ce rapprochement est relativement indirect… (Si vous n'aviez pas remarqué ça, il est temps d'écouter tous les artistes américains non classés dans le progressif qui les ont inspirés !). Avec "In a world", c'est un peu pareil.
Quoi qu'il en soit, "In a world" est une sorte d'énorme suite aux pièces complexes mais toujours mélodiques, où sont parfois juxtaposées des parties de styles très différents, allant du hard rock au rock progressif symphonique classique, incluant des éléments de jazz, de classique, et même de musique mexicaine (sur "in a world" !) avec toujours un soucis mélodique constant et des parties instrumentales brillantes.. Même si C.V. est souvent "typiquement progressif" (entendez : rythmes syncopés à foison, etc.), ils savent ici ménager des plages calmes et lentes. A côté du piano, de l'orgue Hammond et du moog assez présents, les synthés font parfois la différence par rapport à leurs influences, avec beaucoup de textures limpides, orchestrales, souvent assez modernes. Pareil pour certains solos de guitares d'une fluidité étonnante, un peu jazz rock.
Par contre, en ce qui concerne le chant… cela reste affaire de goût. Passé l'excellente suite du départ "in a world" et les quelques morceaux qui suivent, Todd Plant a parfois tendance à forcer sa voix et à utiliser un registre aigu et éraillé en même temps, un peu comme sur l'album live d'ailleurs, alors qu'il faisait preuve de plus de retenue sur le précédent album studio. C'est dommage, voire agaçant. D'autres s'en réjouiront peut-être, ou s'en moqueront, d'autant plus que les chœurs très fréquents adoucissent l'ensemble des vocaux mais comme le chant demeure assez présent chez Cryptic Vision… à vous de voir.
Si on fait abstraction des détails cités ci-dessus, "In a world" est globalement très réussi, peut-être un peu trop long (un comble de ressentir ça de nos jours !), toujours pas révolutionnaire mais bien fait, sincère et inspiré, à même de plaire à de très nombreux amateurs de rock progressif.
Marc Moingeon
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