(680 mots dans ce texte ) - lu : 886 Fois
Caamora est le énième side-project de Clive Nolan, ci-devant clavier de Pendragon et d’Arena -entre autres- monté cette fois-ci avec la chanteuse polonaise Agnieszka Swita. Et on y trouve du beau monde : Alan Reed (Pallas) et Christina Booth (Magenta) également au chant, Mark Westwood (Néo) aux guitares, John Jowitt (IQ) à la basse et Scott Higham (Pendragon) derrière les fûts, bref, un line-up de rêve complété par une tripotée de choristes et d’instrumentistes classiques.
"She", entièrement écrit et composé par Nolan, est le fruit d’un long travail de deux années, annoncé à travers trois EP, "Closer", "Walk on water" et "Embrace", sur lesquels figuraient déjà des morceaux dont on savait qu’ils seraient repris sur la grande œuvre à venir. "She" est donc le premier véritable album de Caamora. Conceptuel, il est l’adaptation musicale d’un roman victorien de Henry Rider Haggard, connu pour avoir écrit "Les mines du roi Salomon" et créé le personnage d’Allan Quatermain. "She" explore les thèmes du pouvoir, de la vie et de la mort, de la réincarnation et de la sexualité en racontant l’histoire d’Ayesha (She), créature africaine d’une beauté exceptionnelle, prototype des femmes toutes puissantes (désirables et effrayantes) qui s’est rendue immortelle en se baignant dans une colonne de feu qui est la source de vie. Elle attend depuis deux mille ans la réincarnation de son amant Kallikrates qu’elle a tué au cours d’une crise de jalousie, et elle croit le reconnaître en Léo Vincey, fils adoptif de Horace Holly, lesquels voyagent ensemble en Afrique. Agnieszka Swita est "She", Clive Nolan est "Léo" et Alan Reed, "Holly". Voilà pour le pitch… vous allez pouvoir briller en société maintenant !
Pour ce qui est de l’album, il faut d’abord commencer par prendre son élan : "She", c’est plus de deux heures de musique, l’acte I sur le CD1 (56 min - 13 titres) , l’acte II sur le CD2 (66 min - 11 titres) et c’est organisé comme une œuvre lyrique, avec son livret, son ouverture, ses actes et ses scènes.
On met la première galette et on s’envoie "Overture". Le son est énorme, symphonique, l’ambiance est posée et on se dit qu’on comprend pourquoi la gestation a pris deux années. On passe au second morceau, puis au troisième… et au bout du cinquième, on commence à se demander où sont les guitares. Non pas qu’elles soient absentes mais elles jouent souvent les faire valoir. J’aurais bien aimé plus de rythmiques rageuses comme celles de "the storm". On laisse passer encore 5 titres, et on commence à trouver l’omniprésence du chant presque gênante. Du coup, il n’y a pas de longues plages musicales, d’envolées lyriques portées par des soli frissonnants de claviers, il n’y a pas de développements musicaux complexes, justes des ponts instrumentaux simples entre des structures couplet/refrain… On a vraiment l’impression que Nolan s’est laissé plus conduire par le texte que par l’envie de développer la musique !
Au niveau composition et arrangements, le travail est colossal, le mariage quasi permanent entre les sons électroniques, les guitares et les instruments classiques (bois, cuivres et cordes) est réussi car il ne les laisse ni s’affronter, ni se juxtaposer… ils construisent le projet ensemble à l’instar de ce "judgement", belle surprise qui fait un peu penser au "the trial" de Pink Floyd. Mais dans "The wall" le Floyd n’avait fait qu’un seul morceau comme ça…
Certes, il n’y a rien de vraiment désagréable dans cette œuvre, mais la surprise n’y est pas, je dirais même qu’à l’écouter sans break le chant nous use et l’ennui finit par nous guetter. On pouvait s’attendre à un opéra prog’, nous n’aurons qu’une comédie musicale. Le projet était réellement ambitieux et on le sent dans la qualité de la réalisation, la complexité et la richesse des arrangements ainsi que dans les mélodies souvent jolies, mais le texte a tué le lyrisme dont on sait Clive Nolan parfaitement capable.
Dominique Jorge
Temps : 0.0669 seconde(s)