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Il n'était pas dans mes intentions de traiter ce CD à part? mais j'ai fini par me ranger à l'avis du boss (fayotte !). "Si ce CD est si bon, pourquoi ne pas en faire une vraie chronique ?" m'a-t-il dit. C'est qu'il a les chiffres en main, les études de marché, les sondages, et il sait bien que mon long article trimestriel n'est pas lu : trop long, en fin de mag', les gens sont crevés pour attaquer un tel pavé. Cela n'aurait donc pas été lui rendre justice que de noyer ce CD au milieu de mes délires.
Car cet ovni sorti de nulle part est un véritable joyau ! Il ne s'agit pourtant ni d'une réédition ni d'une nouveauté mais des 2 à la fois. Je m'explique. Acanthe est un groupe de la région de Grenoble, conduit par Frédéric Leoz, ayant existé de 1973 à 1977 sans jamais sortir le moindre disque. Et c'est à peu près tout ce que l'on sait car Musea ne s'est pas foulé avec un livret affligeant. Cela ne fait qu'entretenir mes doutes sur l'origine de ces enregistrements. Comment un groupe a priori amateur a-t-il pu laisser (et, si je comprends bien, égarer par dessus le marché) des bandes d'une telle qualité sonore ?
Certes les 5 lignes du livret nous apprennent que Frédéric Leoz a restauré et reconstitué ces bandes pendant 5 ans dans son studio de St-Michel-sur-Orge (pas bien loin de chez moi en gros?) mais habituellement on perçoit l'origine fatiguée des trésors oubliés. Ici, non ! C'est le terme "reconstitué" qui m'interpelle. Vu ses talents de multi-instrumentiste (guitare ? claviers) n'aurait-il tout simplement pas tout refait ? Ceci pourrait expliquer l'absence de citation des autres membres du groupe bien que leur photo soit reproduite.
Je suis vraiment bluffée par une telle musique aux influences très diverses : un petit côté planant à la Hawkwind, des mélodies psyché à la Amon Düül/Pink Floyd, de la complexité crimsonienne mais pas trop, un clavier qui rappelle parfois les Doors et des envolées de guitares absolument lumineuses. Autant d'influences digérées qui donnent à Acanthe un style quasi unique dans ce que je connais de la scène française. Quoique, et c'est là que c'est assez curieux, l'intro de "the old world death" m'évoque furieusement Air dans la fabuleuse bande son du film "Virgin suicides". Chronologiquement ce serait plutôt l'inverse, à se demander si le duo français n'était pas tombé sur ces bandes avant tout le monde tant le style nonchalant et mélancolique de ces albums se ressemble, cuisiné plus rock bien sûr pour Acanthe.
Bon, vu mon enthousiasme, vous allez croire que je touche des pots de vin. Des défauts, il y en a évidemment, mais si peu. À vrai dire je ne vois que le chant quand il est en français. En évitant l'écueil théâtral à la Ange, Frédéric n'a pas réussi à ne pas sonner variétoche un peu naïve. Des passages d'"oiseau de feu" me font même penser à du Fugain. Heureusement ces titres ne sont qu'au nombre de 3 et, de plus, assez majoritairement instrumentaux. On peut seulement regretter que 2 de ces 3 titres se retrouvent en vitrine sur les 4 en écoute sur le myspace. Vocalement pas très représentatif des 9 titres de ce CD que, ce tout petit bémol mis de côté, je vous encourage vivement à acquérir.
Il serait tout de même dommage d'avoir remonté des abysses un tel trésor pour qu'il ne profite à personne !
Laure Dofzering
PS : Après recherches, citons tout de même les musiciens de l'époque aux côtés de Frédéric : Pierre Chorier (batterie), Michel Gervasoni (guitare) et Christian Gendry à la basse, décédé à la fin des années 80 et à qui la page www.myspace.com/acanthe1 est dédiée.
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