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Quand je vous dis que la vie est bien faite ! J’avais à peine achevé ma chronique du premier album que l’ami Benoît Herr, toujours au courant de tout, comme un vrai patron du KGB, m’informait que Poetica In Silentio venait de sortir un nouveau CD. Après quelques embrouillamini pour commander ce disque en Allemagne (et malgré la monnaie commune, je me pose pas mal de questions sur la construction de l’Europe…) et un peu de patience, voilà la bête.
D’entrée, on note que Christine Vermeulen remplace Cynthia Prummel au violon (bien que cette dernière reste nommée dans les remerciements), et que ce dernier CD est encore une auto-production du groupe. Apparemment, nos hollandais ne laissent rien au hasard et veulent garder le contrôle à toutes les étapes de l’élaboration de l’album. De fait, du mixage à la masterisation, de la pochette au site web, tout est réalisé par Poetico In Silentio la qualité du résultat, tant externe que musicale, est toute à leur honneur.
En 7 ans, le groupe a mûri et nous propose un album plus personnel, plus expressif, plus actuel aussi que leur disque de 1996. On remarque un son bien plus fourni et plus clair qu’auparavant, avec notamment beaucoup plus de couleurs dans les claviers utilisés, et surtout, une dynamique exacerbée qui rend justice aux climats sans cesse changeants des divers titres. Mais l’évolution est beaucoup plus prononcée sur le fond, avec un style musical moins évident, moins simple, plus haché et torturé. Les influences faciles à cerner du premier album, en rapport avec le progressif anglais des 70’s, ont ici quasiment disparu. On pense encore à Gentle Giant par instants, mais la tendance générale lorgne vers le néo–prog actuel (en voilà une étiquette bien commode !).
Bon, qu’est-ce qu’il connaît notre poisson ? Après une intro acoustique "classique" déboule "behind the door", rapide et changeant, avec un chant très assuré, volubile et démonstratif, où l’on perçoit le renfort des autres musiciens aux "background vocals". La violoniste Christine appose d’ailleurs ses chœurs tout au long de l’album en de subtiles interventions, juste pour modifier la couleur d’un passage, d’un refrain.
La suite du disque met en évidence cette recherche de teintes musicales différentes, de contrastes instrumentaux, comme sur le morceau "the dance" où le violoncelle répond à l’accordéon, où une flûte enregistrée de très près accouche d’une très belle guitare acoustique.
Le titre "paper ships" est beaucoup plus rentre-dedans, presque agressif suite à une volonté d’être plus fort émotionnellement, de faire passer un message un peu désespéré.
"Sweet lies" est carrément rock, rapide et incisif, et la voix de Jurtko Moerbeek (auteur de tous les textes, une fois encore) prend ici des accents à Peter Garrett de Midnight Oil . Mais le groupe maîtrise sa vitesse et propose toujours des variations thématiques reprises par le violon ou la guitare électrique.
J’ai beaucoup aimé le morceau "tell me" qui repose sur deux éléments opposés : des voix énervées et des guitares "sèches" au rendu absolument fabuleux en terme de grain, d’emphase et de présence. Une gratte cachée derrière chaque enceinte !
Les 12 morceaux étant variés, assez courts (pas plus de 6 minutes pour un disque d’à peine trois quarts d’heure), on arrive vite à la fin du CD sans avoir ressenti la moindre lassitude. On garde, quelque part, l’impression de n’avoir pas tout compris, que certaines parties demanderaient à être approfondies, que d’autres passages se réécouteraient avec délice, preuves de la richesse de ce disque.
J’ai appris dernièrement qu’il existait un autre album de Poetica In Silentio, "Rolls of dice",paru en 2000, et qui fait le lien entre la chaleur du 1er opus et la complexité audacieuse du dernier. Un achat prioritaire si vous m’avez bien compris…
Dominique Reviron
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