Ange : La Voiture À Eau (1999 - cd - parue dans le Koid9 n°31)

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Ça y est ! Ange est redevenu Ange, point final. Terminé «Christian Décamps et fils», et le «Nouvel Ange». Ce qui tenterait à prouver -si besoin en était- que Christian Décamps était et reste bel et bien, et en fin de compte, l'Âme du groupe. Ce qui n'enlève rien à la très haute estime que je porte à tous les musiciens qui, un, jour ou l'autre, ont fait partie du convoi d'Anges heureux... Qu'on se le dise ! Je veux juste baver par là, qu'à l'instar de Dominique Leguennec, chez Mona Lisa, Christian était, et reste la tête pensante et la figure de "(le) proue"... de Ange. C'est comme ça et c'est tout.

J'avais pris une telle claque à l'écoute de "3ème étoile à gauche" que j'attendais le 28ème enregistrement studio de la bande à C.D : "La voiture à eau", avec une impatience non feinte. La déception est d'autant plus grande...

Et oui, chers lecteurs, vous avez bien lu. Quitte à vous choquer, ou à tout le moins à vous surprendre -moi, l'inconditionnel, je dois reconnaître que je suis déçu par ce "nouvel" Ange. Et pourtant, ça commence sur les chapeaux de roue : "le rêve est à rêver (2ème service)", confirme tout le bien que je pense de chacun des musicos du groupe. Une basse ronflante et vrombissante à souhait ; comme on aime. Des claviers, où fleurissent -sous les doigts "à-Gilles"... non, sous les doigts de Tristan ! des arpèges à la Genesis. La bonne grosse voix de Christian, au service d'une bath mélodie ; un superbe chorus de gratte en prime ; un bon gros son d'ensemble, quoi. Donc un début prometteur qui nous fait dire: «chouette ! ça va être le pied !» Hélas, tout retombe assez vite; un peu à la manière d'un soufflé... raté. (Je suis d'autant plus déçu, que l'album -dont je ne possède ni la pochette, ni le livret ! et bien, il semblerait que cet album donc, rende hommage à un Monsieur que j'aime beaucoup: Leonardo da Vinci. Yes, celui-là même qui a peint la Joconde. Mona Lisa si vous préférez... Mais pourquoi bon sang, Mona Lisa le groupe, n'a-t-il jamais pondu un concept-album sur la vie du génial inventeur italien? il faudra que je le demande à qui de droit...)

Pour en revenir à Ange et à leur "voiture à eau", c'est surtout du côté composition que cela pêcherait. (L'impression qu'on a survolé la chose, sans s'y attarder réellement.) Car les textes "Décampesques" sont toujours aussi forts et fous ! et toujours truffés de jeux de mots astucieux. Bref, du 100 % Décamps. Exemple : "elle fait mes rides", bien vu. "Coma des mortels", plutôt sympa. Et bien d'autres dans la même veine. Mais, car il y a un mais ! des textes, il faut bien le dire tout de même, sauvés parfois in extremis du ridicule, ou de la "cata". Exemple : "mémoires de Jacob Delafon" (pas de "l'archi­merde"... mais presque.) "mémoires de Jacob Delafon" ou, l'hymne aux chiottes. Passons rapidement ce petit coin où les nausées abondent... N'empêche, il fallait oser ! et, malheureusement, le final en dehors du coup ne rachète pas le morceau. Alors, un peu d'Éparcyl et hop !...

Revenons en arrière, au 2ème titre (l'album en compte la bagatelle de 17 !) "psychosomagique génie" : une bonne démonstration de batterie et des effets bizarres sur les voix, ne font pas forcément toujours une très bonne chanson... Celle-là ne tient pas la distance. Et pourquoi donc ces arpèges de guitare dissonants, malvenus, dans le final ?

Et on avance. La trilogie des "eurêka" ("eurêka", "eurêka in extenso" et "archimède") ou, quand Tristan se prend pour Vangelis ! Je verrais parfaitement bien quelques mesures de certains des fantastiques instrumentaux présents, servir la cause de documentaires télévisés... En tout cas, il y a là un Son comme beaucoup de groupes -et pas seulement français ! aimeraient en avoir ; ça c'est sûr.

"Elle fait mes rides" : Joli titre, pour un non moins joli texte ; mais une mélodie qui n'accroche pas vraiment, et des arrangements bien plats. Dommage. "L'eau qui dort" ou, comment on se surprend à regarder dehors et à ne plus écouter la musique. Il n'y a pas que l'eau qui s'endort...

Sur le titre "archimède", c'est Tristan qui chante. Mais là, sa voix me laisse froid et la musique, de marbre. Je sais ! je ne vais pas me faire que des copains... C'est la vie. "Coma des mortels" est plutôt brouillon, et "quelquefois", bien léger. Avec en plus, un accent à la CharlÉlie Couture (artiste dont je suis loin de raffoler) qui traîne ça et là et qui finirait par m'agacer. Est-ce bien Christian qui chante sur ce titre ?... Dans une certaine apathie, on attend mieux. On espère nettement mieux. Mais où sont les superbes idées -pas toutes totalement épuisées, j'en mettrais ma main au feu- de "3éme étoile à gauche" ? Et j'en suis là de mes pensées vagabondes, quand enfin en arrive une, d'idée ! Quand débarque sans crier gare (de Troyes), "ethnies". Et on se reprend à espérer ; on se remet à y croire. "Ethnies" : c'est LE tournant du C.D. C'est sans conteste possible, LE tube de l'album. Un tube à la Ange bien sûr ; cela va de soi. Mais cette fois, Ange "joue dans la cour des grands"... C'est l'explosion tant attendue. C'est renversant. Ça vous fout sur le cul ! etc, etc... Les musiciens se lâchent et font des merveilles et de merveilleuses trouvailles. Mais bon dieu que ce serait bien si "ethnies" devenait un tube pour de bon !... (pardon, j'ai du rêver trop fort.) Je suis une nouvelle fois cloué à mon fauteuil par le martèlement d'Hervé. Quel monstrueux batteur, ce mec ! Tout est là, dans "ethnies". Tout ce que malheureusement, on ne retrouve pas forcément ailleurs, dans l'album : une hyper puissante composition ; un son "Énaurrrme". Et par dessus tout ça LA voix de Monsieur Christian ! SES paroles sur l'actualité brûlante le Kosovo, etc... Ils font magnifiquement "le diable à cinq" sur ce titre, nos «Anges» préférés. Et en apothéose, on a droit à un final complètement inattendu. GRANDIOSE !!!! En vérité je vous le dis, c'est LE morceau du C.D. Celui grâce auquel le disque mérite totalement d'être (r)acheté. (Ouf ! et moi aussi, je vais peut-être être racheté... )

Cela dit, pour le reste, la sauce ne prendra plus vraiment. L'alchimie ne se faisant pas. "Patisonges et mentisseries" : chansonnette guillerette, sur fond musical époque "Renaissance". Sympa, mais anecdotique. "Mémoires de Jacob Delafon" j'en ai déjà dit du mal... "Et Gandhi l'hindou dit tout doux" (à part les jeux de mots ?... et toujours ces accents "Couturesques" !) . "La serrure ou la clé", au final déjanté, qui tombe comme un cheveu sur la soupe.

"Jardin secret" : 2ème morceau à l'ambiance "mille et une nuits" (le 1er étant "Gandhi..." ). Quelques très chouettes moments, dont le final époustouflant, qui aurait mérité 100 fois de clore l'album... en beauté!

Et je me dis que l'ultime morceau devrait forcément dégager. Comme à chaque fois ou presque chez Ange. Mais non ! et je reste sur ma faim et ma soif...

Vivement la fin de "La voiture à eau" (le titre), que je me repasse la 11ème plage; oui, celle d' "ethnies" !... Comment ? vous dites ? j'ai oublié de parler de "bilboquet" ? Ça c'est I' bouquet Bill ! (et si je l'avais fait exprès ?...) Au total, un C.D en dents de scie, qui manque donc cruellement d'unité. Ce qui est fort dommageable pour un album qui - me semble-t-il, en tout cas, je le redits- se veut être un concept-album.

Mais bientôt, sortira le 29 ème opus studio de Ange (car, et c'est tant mieux, beaucoup de gens aimeront celui-là et feront fi de ma chronique de merde ! en me traitant de salaud, comme je le mérite.). Et déjà, je l'attends ! je l'attends comme tous les ans ce "nouvel" Ange. Et comme la Madeleine de Brel, moi j'aime bien ça !

Zif" Poulet (à-la-dent (!) dure.)






Cet article provient de Koid'9 magazine rock & progressif

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