Big Big Train : The Underfall Yard (2009 - cd - parue dans le Koid9 n°72)

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Le groupe de Gregory Spawnton (guitares, claviers, basse) et Andy Poole (basse, claviers) accouche ici de son sixième véritable album. Le duo s'est séparé de son dernier chanteur en date, le pourtant doué Sean Filkins, et a recruté David Longdon, chanteur mais aussi multi-instrumentiste (flûtes, mandoline, dulcimer, claviers, etc.), qu'on a pu remarquer en 2008 sur le disque solo de Martin Orford "The old road". Complétant ce trio, on trouve le décidément omniprésent Nick D'Virgilio à la batterie (il jouait déjà sur le précédent album, "The difference machine") mais aussi d'autres invités, notamment Dave Gregory de XTC qui prend en charge tous les solos de guitare sauf un, joué par un revenant dans le monde du rock progressif : Francis Dunnery ! Les deux hommes et Spawnton sonnent parfois comme Steve Howe ! Jem Godfrey de Frost* est également venu faire un petit solo de synthé. Spawnton a écrit la totalité des morceaux et la direction musicale a légèrement évolué depuis le précédent album. La musique de Big Big Train est à la fois complexe et accessible, les mélodies sont belles mais nécessitent quand même une attention soutenue, de même que les parties instrumentales largement développées sur cet album.

"The underfall yard" compte seulement 6 morceaux (de 5 à 23 minutes) pour un album qui atteint quand même plus d'une heure. Les influences de Spock's Beard présentes sur "The difference machine" se sont estompées, le côté jazz aussi, et ce n'est pas plus mal. On retrouve cette fois-ci une musique tour à tour pastorale, mélancolique et lyrique, ou plus dynamique, inspirée souvent par Yes (évident sur la fantastique "victorian brickwork"), Genesis et Anthony Phillips pour les passages les plus calmes et les plus acoustiques. En fait, les comparaisons ne sont pas si faciles : Big Big Train fait du Big Big Train ! Le groupe a trouvé un style, assez varié il est vrai, mais avec quand même des éléments typiques dans les mélodies vocales, accessibles et belles, arrangées avec beaucoup d'harmonies. Les parties de guitares acoustiques et électriques mêlées sont soutenues par une basse ronde et puissante, mélodique, un peu à la façon de Chris Squire. Les claviers, nombreux, plutôt traditionnels dans leurs sons (piano, orgues et mellotron), orchestrent le tout avec beaucoup de goût, renforcés par le violoncelle de David Foyle assez fréquent et fort bienvenu. Et puis il y a aussi parfois un autre ensemble instrumental qui apporte beaucoup d'originalité à certains titres et j'y reviendrais juste après… Les textes méritent largement le détour. Cette fois-ci, Greg Spawnton s'est posé en conteur évoquant, entre autres, les tranches de vie d'ouvriers de l'Angleterre passée. C'est peut-être cette forme de tradition qui l'a incité à inclure la participation de quatre musiciens d'un "brass-band" – les fameuses fanfares anglaises, assez différentes des nôtres dans leur répertoire, nettement moins festif. Ici, le mélange est superbe, aussi bien qu'inattendu, notamment sur "victorian brickwork" dont le final solennel est vraiment touchant, empreint d'une majestueuse mélancolie. Le morceau titre de 23 minutes aux multiples sections très habilement fondues les unes dans les autres est un autre point fort de l'album mais chacun de ces 6 morceaux est tout à fait réussi, ce qui n'a pas toujours été le cas auparavant.

Quant à David Longdon, sa voix assez changeante, qui sait être douce et émouvante ou bien plus puissante, voire passionnée et même rageuse de temps en temps, ressemble plus ou moins à un mélange de celles de chanteurs comme Peter Gabriel, Gary Chandler, Steve Thorne, ou même Cat Stevens. David s'avère être un chanteur particulièrement charismatique.

Big Big Train confirme les qualités développées peu à peu au fils des ans et accouche ici d'un album superbe et plein d'émotion, probablement leur meilleur à ce jour. Il est plus que temps que le groupe gagne une reconnaissance largement méritée !

La longue suite donnant son titre à l'album est téléchargeable gratuitement sur www.bigbigtrain.com, et le disque disponible pour le prix très modique de 9 £ (port compris !) sur le serveur sécurisé du groupe, alors laissez-vous tenter !

Marc Moingeon






Cet article provient de Koid'9 magazine rock & progressif

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